L'Attracteur     No. 3     Automne 1996 LA REVUE DE PHYSIQUE ISSN 1207-0203

LE CONGRÈS ANNUEL DE L'ACP

Le congrès annuel de l’Association canadienne des physiciens et des physiciennes (ACP) s’est tenu du dimanche (eh oui!) 16 juin au mercredi 19 juin à l’Université d’Ottawa. Le programme du congrès comprenait des conférences spéciales, des communications, une séance d’affiches, des exposants, et des conférences données par divers lauréats. C’est aussi à cette occasion que se tient l’assemblée générale annuelle de l’ACP. Ce congrès revêt, à plusieurs égards, une grande importance pour tous ses membres. En bref, il permet aux physiciens et physiciennes : 1) de suivre les nouveaux développements aux niveaux de la recherche et de l’enseignement de la physique, 2) d’échanger des connaissances scientifiques et 3) de présenter les résultats de leurs travaux scientifiques. Afin de vous mettre un peu au parfum de la physique au Canada, il me fait plaisir de vous donner un compte-rendu de ce dernier congrès.

Le comité organisateur a opté pour une formule de sessions de conférences données en parallèle. Seules les conférences prestigieuses ont été données devant un auditoire général. Cette formule permet la présentation d’un plus grand nombre de communications (orales ou affiches) mais restreint généralement les participants aux communications propres à leurs domaines de spécialisation. Malgré une couverture incomplète de l’événement, j’ai tout de même essayé de dégager les faits saillants de cette conférence.

Même si on trouvait quelques conférenciers étrangers de renommée internationale, la plupart des participants à cette conférence étaient canadiens. Au total, il y a eu environ 360 communications scientifiques; incluant conférences, communications orales et affiches. J’ai compté le nombre total de communications dans chacun des grands domaines de la physique. Ces statistiques sont données au tableau 1. Les domaines indiqués correspondent aux différentes divisions de l’ACP. Notez qu’un grand nombre de communications (environ 30%) couvrait plus d’un domaine de recherche. La physique de la matière condensée, l’optique et la photonique ont été les domaines les plus représentés. Ceux-ci ont toujours joué un rôle moteur dans le développement des autres domaines de la physique et dans l’établissement de ponts entre les différentes disciplines (physique-chimie, physique-biologie, ...). À mon avis, ces statistiques reflètent bien l’importance de ces domaines de recherche dans la physique au Canada.

La recherche au Département de physique de l’Université de Sherbrooke étant principalement axée sur la physique de la matière condensée, je me suis intéressé plus spécifiquement à une classification du nombre des communications en fonction des différents domaines de la physique des matériaux. Ces statistiques sont présentées au tableau 2. Quoique grossières, elles indiquent clairement que la physique des semiconducteurs et des microstructures est un domaine très actif au Canada (36% des communications de physique de la matière condensée portait sur ce sujet). Quoique relativement nouveau, le domaine de la physique appliquée aux sciences biologiques et médicales semble également être « en excellente santé », au pays.

Au niveau de l’éducation, quelques conférences ont porté sur les nouveaux moyens multimédia et l’enseignement de la physique. L’utilisation du réseau INTERNET permettra dans un avenir rapproché aux professeures et professeurs d’avoir accès à une banque de démonstrations éducatives. Les étudiants pourront également utiliser ces outils pour faciliter l’assimilation de notions complexes de physique.

Parmi les conférences prestigieuses, je me dois de souligner les excellentes présentations des professeurs D. Kleppner et W. Ketterle (du Massachusetts Institut of Technology) sur la condensation de Bose-Einstein dans des gaz d’atomes. Ces auteurs ont observé qu’à très basse température, les atomes d’un gaz de sodium perdaient leur identité pour condenser dans un même état quantique[1, 2, 3] . Les résultats expérimentaux de ces auteurs ont couronné les efforts de nombreux groupes de recherche travaillant à la découverte du condensât de Bose-Einstein dans des systèmes en faible interaction. Cette observation a été rendue possible en grande partie par le développement de techniques sophistiquées de refroidissement des atomes à l’aide de faisceaux lasers.

Le professeur E. J. Heller de l’Université de Harvard a également retenu l’attention du grand public lors de sa présentation sur le chaos quantique. Ces calculs théoriques des différentes trajectoires d’un électron enfermé dans une cavité réfléchissante ovale (équivalent d’une table de billard) montrent qu’il existe une correspondance entre la densité des trajectoires classiques et les états propres prédits par la mécanique quantique[4, 5]. Il a également présenté les résultats d’expériences spectaculaires réalisées sur ce type de système où un microscope à effet tunnel a été utilisé à la fois pour construire la cavité et pour sonder la probabilité de présence de l’électron[6, 7, 8].

Les exposés oraux ont été classés de façon judicieuse entre les différentes sessions de conférences. La qualité des exposés était plutôt inégale, mais le programme était tout de même excellent sur le plan scientifique. Pour terminer, j’aimerais conclure en mentionnant quelques sujets de pointe qui ont particulièrement piqué ma curiosité: 1) les systèmes à gap photonique, 2) le comportement des molécules soumises à des champs intenses produits par des lasers à impulsions et 3) les techniques de croissance ou de déposition sélective d’atomes sur la surface d’un substrat[9]. À mon avis, les domaines connexes à ces sujets de recherche sont en pleine expansion et devraient intéresser un grand nombre de physiciens et de physiciennes dans les années futures.

Denis Morris


Références :

  1. Phys .Rev. Lett. 75, 3969 (1995)
  2. Science vol. 269, 152 (1995)
  3. Science vol. 270, 1902 (1995)
  4. Nature vol. 369, 464 (1994)
  5. Nature vol. 380, 583 (1996)
  6. Science, vol. 262, 218 (1993)
  7. Physics Today, Nov. 1993, pp. 17-19
  8. Nature, vol 380, 608 (1996)
  9. La recherche 283, janvier 1996, pp. 42-47

Tableau 1:

Nombre de communications dans chacun des grands domaines de la physique
Total (%)
Géophysique 1 0.3
Physique de l'espace et atmosphérique 13 3
Physique atomique et moléculaire 39 11
Physique de la matière condensée 135 38
Physique appliquée et industrielle 20 5
Physique biologique et médicale 19 5
Physique nucléaire 19 5
Optique et photonique 85 24
Physique des particules 38 10
Éducation 13 3
Physique des plasmas 19 5
Physique des surfaces 31 9
Physique théorique 43 12


Tableau 2:

Nombre de communications dans chacun des grands domaines de la physique de la matière condensée
Total (%)
Semiconducteurs, microstructures 49 36
Supraconducteurs 12 9
Diélectriques 12 9
Matériaux magnétiques, métaux, polycristaux 26 19
Liquides, verres, matériaux amorphes, cristaux liquides 35 26
Matériaux pour sciences biologiques et médicales 16 12



Dernière mise à jour: 15 novembre 1996.

Mise en page par Gilbert Vachon

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